En Belgique, de nombreux dirigeants d’entreprises profitent d’une voiture de société. Qu’ils soient médecin, boulanger, architecte ou avocat, ils ont en effet besoin d’un véhicule pour exercer leur profession.

Que vous optiez pour une camionette, un SUV, une berline ou une belle voiture de luxe, ce choix vous appartient et votre contrôleur ne peut, en aucun cas, se prononcer sur le type de véhicule que vous conduisez. D’un point de vue strictement légal, il ne peut pas porter de «jugement d’opportunité».

Avantages d’une voiture de société

Le principal avantage d’utiliser une voiture de société est que les frais sont fiscalement déductibles. Néanmoins, le dirigeant d’entreprise utilisant son véhicule aussi à des fins privées (p. ex. « déplacement domicile-lieu de travail ») s’expose à un avantage imposable. Le contribuable paiera donc des taxes sur l’usage privé de la voiture, le fameux ATN. Pour rappel, l’ATN (avantage de toute nature) est la valeur économique de la mise à disposition à « titre gratuit » d’un bien appartenant à la société. Il faut donc garder à l’esprit que cet ATN doit rester fiscalement intéressant.

Deux voitures dans votre société, possible ?

Vous êtes l’associé unique de votre société et vous envisagez d’acheter une seconde voiture via votre entreprise ? Si auparavant cette décision posait rarement problème – l’interdiction de porter un jugement d’opportunité était chaque fois rappelée aux controleurs fiscaux qui obtenaient rarement gain de cause en justice – cette situation semble aujourd’hui ne plus être aussi facilement tolérée par l’administration fiscale. Vous le verrez, certaines précautions doivent dorénavant être prises si votre société met à votre disposition deux voitures.

Pour vous en convaincre, faisons un petit tour du côté de la jurisprudence…

En 2017, à Anvers, un administrateur exercant une profession libérale, et accessoirement grand amateur de voitures de luxe, avait acquis deux véhicules via sa société : une BMW 740 et une Porsche 911. Sa société déduisait légalement les frais de ces deux voitures. Utilisant aussi ces véhicules à titre privé, le gérant avait prudemment déclaré un ATN forfaitaire calculé correctement sur les deux véhicules.

L’administration fiscale a considéré cette situation comme un dérapage… Elle a rejeté les frais de la voiture la moins chère, considérant que ce contribuable n’avait pas besoin de deux voitures pour exercer sa profession. Dans son analyse, le fisc n’a pas voulu prendre en compte qu’un double ATN avait été déclaré.

Qu’en a pensé le juge ? La justice a finalement accepté la position du fisc. La théorie de la rémunération en nature ne passa pas : un ATN ayant été calculé pour les deux voitures, celles-ci constituaient une partie de sa rémunération et étaient par définition fiscalement déductibles. Le juge estima cependant que l’intéressé ne démontrait pas que l’avantage lié à la mise à disposition de deux voitures avait été accordé en contrepartie de prestations effectives, précise Indicator, un site de référence dans les domaines juridiques et fiscaux.

Le fait qu’un double ATN ait été déclaré n’impliquait pas d’office que les frais étaient liés à l’activité professionnelle de la société et qu’ils contribuaient à acquérir ou conserver des revenus professionnels (art. 49 CIR 92).

Néanmoins, les frais de la première voiture du dirigeant ont en effet été admis sans difficulté, car il était clair qu’il l’utilisait à titre professionnel.

Quelles mesures prendre alors ?

Dans l’hypothèse où vous avez quand même décidé d’acheter une seconde voiture de société, le conseil que nous pouvons vous donner est de rester prudent. Il y a des cas évidents. Par exemple, un médecin pourrait invoquer qu’il ne peut pas prendre le risque de ne pas pouvoir se déplacer en cas d’appel d’urgence parce que son véhicule est en panne.

Premièrement, veillez à prouver l’usage professionnel de vos deux véhicules. Un bon système consiste à noter les trajets parcourus par les deux voitures. Cette manière de procéder vous aidera à prouver à l’administration fiscale que utilisez vos deux véhicules à des fins professionnelles (p.ex. le petit véhicule pour les trajets en ville et l’autre pour les longues distances).

Seconde mesure de prudence : prouvez aussi vos prestations. Si vous parvenez à prouver que l’avantage a été accordé en contrepartie de prestations effectives, ces frais seront déductibles comme une rémunération.

Autre point d’attention : sachez qu’il ne suffit plus de déclarer un deuxième ATN voiture sur votre fiche de paie pour pouvoir déduire deux voitures.

Petit conseil et non des moindres : dans le procès-verbal de l’assemblée générale de la société, au point qui traite de la rémunération du gérant, détaillez l’intégralité du pack salarial du dirigeant. En plus d’indiquer le salaire en tant que tel, précisez aussi les ATN (voiture, GSM, ordinateur, logement, …), l’assurance groupe, les tantièmes éventuels,… La jurisprudence admettant souvent la théorie de la rémunération en nature, cela complexifiera le travail de votre contrôleur, s’il s’y oppose.

Toujours dans le procès-verbal de l’assemblée, veillez aussi à démontrer que vous utilisez les deux véhicules à des fins professionnelles. N’hésitez pas à les qualifiez de «rémunération en nature».

Vous l’avez compris, en respectant bien les points d’attention énoncés plus-haut, rien ne vous empêche d’acheter un second véhicule via votre société pour le mettre à votre disposition.  Et ce, même si vous êtes l’associé unique de votre entreprise. Si vous avez besoin d’informations plus précises en la matière, nos spécialistes peuvent vous conseiller davantage.

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